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26
Juin

Vente immobilière, échange de consentement et vente forcée

La vie d’un négociateur immobilier n’est pas facile. Il joue l’entremise entre un vendeur et un acheteur.

Il  fait souvent face à un vendeur avec plusieurs candidats acheteurs et des variations de prix de vente et de mandats.

En droit, aux termes de l’article 1583 du Code civil, un échange de consentement sur les éléments essentiels d’un contrat peut valoir accord et transfert de propriété.

En matière immobilière, nous savons que l’acte notarié est absolument nécessaire pour matérialiser ce transfert de propriété. Cependant, la preuve de l’accord sur l’échange de consentement peut se rapporter par tout moyen.

S’agissant des éléments essentiels, la jurisprudence a toujours considéré qu’un accord sur la chose et sur le prix était suffisant pour matérialiser le consentement réciproque.

Ainsi, des acheteurs et vendeurs se retrouvent parfois engagés dans un accord sans le savoir, souvent par l’intermédiaire de tiers (négociateur immobilier, notaire ou avocat) et des dossiers amiables finissent inutilement en contentieux.

Ainsi, en se plaçant stricto sensu sur le plan du droit, un simple échange de mails entre un candidat acquéreur et le mandataire d’un acheteur matérialisant un accord sur la chose et le prix peut valoir consentement et entraîner un Tribunal saisi, en cas de désaccord, à prononcer la vente forcée du bien.

Dans un arrêt remarqué de la Cour de cassation du 9 mai 2012, la Cour de cassation a pu considérer que la vente était réputée parfaite lorsque l’acceptation de l’un des destinataires de l’offre a été communiquée à l’acquéreur au moyen d’une lettre échangée entre les avocats des différents vendeurs et portant la mention « officielle ».

Il suffit donc pour que la vente soit parfaite que chaque partie ait eu, par des moyens réguliers, connaissance de la volonté de l’autre de s’engager.

Il faut donc constater la rencontre des volontés et cette rencontre peut se faire indirectement comme le précise la Cour de cassation.

Cependant, un certain nombre d’éléments peuvent perturber la rencontre des volontés, cette perturbation peut ne pas être connue du candidat acquéreur.

Ainsi, un candidat acquéreur peut accepter par mail une offre de vente émanant d’un vendeur ou de son intermédiaire.

Cependant, rien n’indique que cette offre n’a pas été précédemment acceptée par un autre candidat acquéreur.

De même, vu la rapidité des échanges liée à internet, il n’est pas exclu qu’au moment où un candidat acquéreur accepte une offre de vente, que celle-ci n’ait pas été préalablement acceptée par quelqu’un d’autre à un autre niveau de prix faisant suite à une négociation qui s’est déroulée dans les heures ou jours qui précédent cet accord.

Mais, la situation juridique peut être encore plus complexe.

Si la jurisprudence a toujours considéré que la chose (donc la description du bien) et le prix devaient être considérés comme les éléments essentiels, la jurisprudence a également pris en compte la réalité d’échanges tenant aux commissions d’agence et aux conditions suspensives qui sont généralement rédigées dans un compromis préalable à la vente, qui peuvent avoir également un caractère substantiel.

Dans une affaire ou après avoir obtenu l’accord sur la chose et sur le prix, l’acquéreur a adressé un courrier électronique pour indiquer qu’il convenait de prévoir une clause de substitution au profit d’une société à constituer, ainsi que l’indication d’un recours à un prêt bancaire.

De même, étaient rajoutés des honoraires de commission d’agence.

La Cour d’appel de Paris, par une décision du 28 mars 2013, a considéré que le fait que l’identité des acquéreurs n’était pas déterminée, ni dans quelles part et portion ils entendaient acquérir, et pas davantage les modalités de financement, qu’une incertitude était née sur la commission due aux intermédiaires immobiliers de sorte qu’il fallait conclure à une absence de preuve d’un accord sur la chose et le prix.

Dans un arrêt récent de la Cour d’appel de Chambéry du 18 juin 2019 sur saisine après renvoi de la Cour de cassation, la Cour a considéré qu’un acquéreur ayant accepté une offre d’achat était fondé à s’opposer à la régularisation de l’acte de cession faute d’acceptation par ce candidat acquéreur des honoraires d’agence immobilière qui ne figuraient pas dans l’offre de vente, honoraires d’agence immobilière qui devaient bien évidemment être à sa charge.

La Cour a considéré que le prix de cession était de ce fait augmenté de près de 10 %, de sorte que l’accord sur la chose et sur le prix ne pouvait être matérialisé.

Il convient donc, dans les échanges entre candidats acheteurs et vendeurs, être extrêmement prudent surtout dans les correspondances électroniques qui constituent des preuves incontestables admises par les Tribunaux.

Béatrice Bénichou- Médina – Notaire – Office Notarial Europole Presqu’île

Pour plus d’informations, vous pouvez la contacter beatrice.benichou-medina@notaires.fr

04.76.48.81.48

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