Référence : Cour de cassation, 3e chambre civile, 18 Janvier 2023 – n° 21-15.195
Par un récent arrêt du 18 janvier dernier, la troisième chambre civile de la Cour de cassation précise la notion d’impropriété à destination en matière de responsabilité décennale des constructeurs, dans le cadre spécifique d’une instance introduite postérieurement à un rapport d’expertise.
Dans cette espèce, était en cause la présence d’infiltrations, découvertes postérieurement à la réception, mais qui n’étaient plus apparentes lors des opérations d’expertise judiciaire, du fait de la réalisation de travaux.
Le débat s’orientait donc sur l’appréciation, dans ces circonstances, de la notion d’impropriété à destination, qui avait été retenue en première instance.
La Cour d’appel de BASTIA retient au contraire que, malgré la disparition du caractère apparent des désordres, l’Expert judiciaire avait pris connaissance de différents éléments probatoires, tels que des photos, vidéos, rapport de cabinet d’expert, ainsi que les diverses correspondances des parties, et que l’ensemble de ces pièces ne permettaient pas de prendre la mesure des désordres survenus, lesquels n’étaient d’ailleurs pas décrit avec précision par l’expert.
La Cour de cassation confirme la motivation retenue par la Cour d’Appel de BASTIA :
« En l’état de ces énonciations et appréciations, la cour d’appel, par une interprétation souveraine, exclusive de dénaturation, que l’ambiguïté des termes du rapport d’expertise rendait nécessaire, a pu, de ces seuls motifs, déduire qu’aucune des pièces versées au débat ne permettait à la SCI d’apporter la preuve de l’existence de désordres de nature décennale et a ainsi légalement justifié sa décision ».
Ce faisant, la Cour de cassation souligne que le juge judiciaire n’est pas lié par les conclusions d’un expert, et peut retenir une qualification différente s’agissant de l’impropriété à destination.
Ainsi que le rappelle Maître Marie-Laure Pagès-De Varenne (Construction – Urbanisme n° 3, Mars 2023, comm. 34) ; la notion d’impropriété à destination est juridique et non technique : il est donc important de veiller à ce que d’autres éléments de preuve – photos, vidéos, correspondances – soient également annexés au rapport d’expertise définitif, afin de permettre aux juges du fond d’apprécier le plus complétement possible cette notion d’impropriété à destination.
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