Dans les faits, une association de protection de l’environnement et plusieurs riverains avaient sollicité l’annulation de dérogations aux interdictions de capture avec relâché et de destruction de spécimens de salamandres tachetées délivrées à deux sociétés pour permettre la construction de trois bâtiments comprenant 60 logements locatifs sociaux et 18 logements en accession sociale à la propriété.
Alors que le tribunal administratif puis la cour administrative d’appel de Nancy avaient fait droit à leur demande, le Conseil d’Etat a censuré la solution retenue par les juges du fond.
Plus précisément, la question était de savoir si le projet litigieux pouvait être regardé comme répondant à une raison impérative d’intérêt public majeur.
Selon la Cour, ce projet ne répondait pas à la première des trois conditions nécessaires à l’octroi d’une dérogation à l’interdiction de porter atteinte à la protection d’espèces protégées au motif que :
- Celui-ci n’était pas nécessaire, à la date des arrêtés litigieux, pour permettre à la commune d’atteindre ses objectifs d’intérêt public d’aménagement durable et de politique du logement social ;
- Il n’était pas démontré que le secteur auquel appartient la commune connaîtrait une situation de tension particulière dans ce domaine.
Le Conseil d’Etat censure toutefois l’arrêt en considérant que le projet répond à une raison impérative d’intérêt public majeur compte tenu :
- De sa nature même : la construction de ces logements est destinée soit à permettre à une population modeste d’accéder à la propriété, soit à assurer le logement des populations les plus fragiles ;
- De la situation de la collectivité : le taux de logements sociaux de la commune, observé sur une période de dix ans, était structurellement inférieur à l’objectif de 20 % fixé par le législateur et l’un des plus faibles du territoire local.
Une telle motivation laisse pour le moins perplexe car si elle vise à limiter les obstacles à la possibilité pour les collectivités de remplir leurs obligations en matière de logements sociaux, c’est au détriment du principe qui est pourtant celui de l’interdiction de détruire, altérer, dégrader les spécimens d’espèces protégées et habitats.