Les agences immobilières exerçant l’activité de syndic disposent au moins de deux sortes de garanties :
- une garantie financière exigée des professionnels exerçant des activités relatives à certaines opérations portant sur des immeubles et des fonds de commerce, en application de l’article 3 de la loi du 2 janvier 1970 ;
- une assurance de responsabilité civile souscrite auprès d’une compagnie d’assurance.
En l’espèce, une agence immobilière exerçant une activité de syndic a informé ses clients, parmi lesquels un syndicat de copropriétaires, des détournements de fonds commis par l’un de ses salariés depuis plusieurs années.
Cette agence immobilière exerçant une activité de syndic était dans l’incapacité de remettre les fonds appartenant au syndicat des copropriétaires à ce syndicat.
Elle a donc procédé à une double déclaration de sinistre, à la fois à sa compagnie d’assurance responsabilité civile et à sa garantie financière, la société CGEC.
Malgré une mise en demeure, l’agence immobilière n’a pas donné suite à des demandes de remboursement, elle a été mise en liquidation judiciaire par le Tribunal de Commerce de Chambery, la créance du syndicat des copropriétaires ayant été admise définitivement par le juge-commissaire.
Dès lors, le syndicat des copropriétaires a tenté d’engager une procédure d’urgence devant le Juge des référés pour obtenir par provision la somme que lui devait cette agence immobilière s’élevant à 231 267,22 €.
La société CGEC, qui a donné sa garantie financière à l’agence immobilière, a estimé qu’au stade du Juge des référés que la créance faisait l’objet d’une contestation sérieuse rendant ce Juge de l’urgence ou de l’absence de contestation sérieuse incompétent.
Elle a estimé que la garantie financière obligatoire souscrite par l’agent immobilier ne pouvait être mise en œuvre lorsque la défaillance de ce professionnel garanti était imputable à ses fautes de gestion relevant exclusivement du contrat d’assurance responsabilité civile.
Ainsi, le garant financier a estimé qu’il appartenait à l’assurance responsabilité civile, compte tenu des détournements de fonds intervenus, de régler.
Ce conflit entre le garant et la compagnie d’assurance allait-elle retarder la condamnation au paiement du syndicat des copropriétaires ?
La Cour d’appel de Chambery, dans son arrêt du 8 février 2022, a rejeté la demande de sursis à statuer de la société CGEC et a condamné par provision la garante à régler les sommes dues au syndicat des copropriétaires.
La Cour de cassation a approuvé la Cour d’appel de Chambery.
Elle a rappelé que la garantie de cet organisme devait intervenir pour toute créance ayant pour origine un versement ou une remise effectuée à l’occasion d’une des opérations prévues à l’article 3 de la loi du 2 janvier 1970.
Le seul justificatif nécessaire pour le syndicat des copropriétaires est de prouver que la créance est certaine, liquide et exigible et que la personne garantie est défaillante, quelle que soit la cause de cette défaillance.
Dès lors que la somme est exigible et que l’agence immobilière s’est avérée défaillante, il n’appartient pas aux juridictions de rechercher l’éventuelle faute de gestion de l’agent immobilier.
Cet arrêt est intéressant, car il montre bien la frontière entre les obligations de la société qui offre sa garantie financière et celles de la compagnie d’assurance garantissant la responsabilité civile.
Les conditions de mise en œuvre de la garantie financière sont simples.
Elles sont totalement indépendantes de celles de la responsabilité civile professionnelle.
Le syndicat des copropriétaires n’a pas à pâtir de la querelle entre le garant et l’assureur responsabilité civile professionnelle.
Cet arrêt est à approuver, il constitue une forte garantie pour le syndicat des copropriétaires et assoit la confiance que le public peut avoir en les agences immobilières.
Béatrice Bénichou- Médina – Notaire – Office Notarial Europole Presqu’île
Pour plus d’informations, vous pouvez la contacter beatrice.benichou-medina@notaires.fr
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