Le régime d’indemnisation des fonctionnaires en arrêt maladie connaît une réforme d’ampleur avec l’entrée en vigueur, le 1ᵉʳ mars 2025, d’une réduction du maintien du traitement à 90 % pendant les trois premiers mois d’arrêt. Acté par l’article 198 de la loi de finances pour 2025, ce nouveau dispositif met fin à une garantie statutaire de près de 80 ans.
Un revirement historique d’un principe fondateur
Pour rappel, depuis 1946, les fonctionnaires en congé de maladie ordinaire bénéficiaient du maintien intégral de leur traitement pendant les trois premiers mois, avant une réduction à 50 % au-delà. Ce principe, inscrit dans l’article L. 822-3 du Code général de la fonction publique, s’inscrivait dans une logique de protection spécifique, garantissant une couverture financière totale aux agents frappés par la maladie.
Cette règle découlait d’une conception historique de la fonction publique, fondée sur des garanties particulières visant à assurer une continuité du service public tout en préservant les droits des agents. L’idée était que la sécurité statutaire devait respecter certaines contraintes propres à la fonction publique, l’absence de négociation salariale individuelle et l’impossibilité pour un fonctionnaire de cumuler plusieurs emplois.
Au fil des décennies, ce principe est resté un marqueur fort du statut des fonctionnaires, affirmant une distinction nette avec le régime applicable dans le secteur privé, où les indemnités journalières de la Sécurité sociale et les dispositifs conventionnels varient selon les entreprises et les accords collectifs.
Une réforme dictée par la contrainte budgétaire
Cette réduction du taux de rémunération en cas d’arrêt maladie est motivée par la volonté gouvernementale de maîtriser les dépenses publiques. L’Inspection générale des finances (IGF), dans un rapport publié en juillet 2024, estime à 15 milliards d’euros le coût des absences pour raisons de santé dans la fonction publique. Parmi les pistes avancées pour en réduire l’impact, figurait la diminution du taux de remplacement à 90 % pour les trois premiers mois d’arrêt, une mesure dont l’application permettrait une économie réalisée à 900 millions d’euros.
L’argument budgétaire s’accompagne d’une volonté affichée d’aligner les règles de la fonction publique sur celles du secteur privé. Ce dernier impose aux salariés un délai de carence de trois jours avant de percevoir les indemnités journalières, complétées éventuellement par l’employeur après sept jours. Si le projet initial du gouvernement envisageait un allongement du délai de carence à trois jours pour les fonctionnaires, la contestation syndicale a conduit à l’abandon de cette mesure, au profit d’un compromis sur la baisse du taux de rémunération sur les premiers mois d’arrêt.
Un bouleversement dans la gestion des ressources humaines : ce qu’il faut noter !
La réforme s’applique à tous les nouveaux arrêts maladie accordés à partir du 1ᵉʳ mars 2025, y compris en cas de renouvellement d’un congé en cours. En revanche, les congés de longue maladie (CLM), de longue durée (CLD) et les congés pour accident du travail ou maladie professionnelle (CITIS) restent exclus du dispositif.
Cette modification aura des répercussions directes sur la rémunération des agents, notamment sur certains accessoires de traitement, tels que la nouvelle bonification indicative (NBI) et certaines primes, qui verront leur montant diminuer proportionnellement à la réduction du traitement principal. Les collectivités territoriales devront adapter leurs régimes indemnitaires pour se conformer à ce nouveau cadre, entraînant une complexification administrative supplémentaire.