La rencontre entre l’offre et l’acceptation provoque du contentieux.
Les juges sont toujours réticents à reconnaître l’existence d’une vente parfaite par l’accord des parties et la rencontre des consentements.
Rappelons que la vente est un contrat consensuel qui se forme par le seul échange des consentements.
* La Cour de cassation a eu à rappeler que l’offre devait être acceptée définitivement (Cour de cassation III, 18 janvier 2024, n° 22-18.996).
En l’espèce, une société a formalisé une offre d’achat au prix demandé sous condition suspensive d’obtention d’un prêt.
Le gérant du vendeur a accusé réception de cette offre et, après avoir rappelé la date ultime de signature du compromis souhaitée, a interrogé l’acquéreur sur ses modalités de financement.
Le gérant du vendeur a signé l’offre d’achat en apposant les coordonnées de son notaire.
Le document a été transmis à l’offrant par l’intermédiaire de l’agent immobilier, étant précisé que le vendeur attendait des offres concurrentes de prêt.
Deux jours plus tard, le vendeur a informé son mandataire qu’il avait reçu une offre plus intéressante qui a été acceptée.
L’offrant sommait le vendeur de signer l’acte authentique, puis l’assignait en vente forcée.
Dans un premier temps, la Cour d’appel a estimé que le vendeur n’avait pas accepté l’offre.
Un pourvoi fut formé contre cet arrêt qui a été rejeté par la Cour de cassation.
La Cour d’appel a :
« Pour retenir par l’absence de mention expresse d’acceptation de l’offre, soumise à la condition suspensive d’obtention d’un prêt ayant fait l’objet d’un accord de principe d’une banque, dont il n’était pas établi qu’il avait été porté à la connaissance (du gérant du vendeur), la seule signature apposée par ce dernier sur le courrier électronique du 26 décembre 2017, alors même que son mandataire précisait le même jour qu’il attendait une autre proposition d’un tiers, ne pouvait suffire à établir la perfection de la vente. »
Il faut en conclure que le juge trouvera toujours une possibilité de considérer la vente non parfaite.
En l’espèce, comme le vendeur s’était réservé la possibilité d’étudier des offres concurrentes tout en souhaitant connaître les modalités de financement, cette attitude ne peut être considérée comme une acceptation définitive de conclure le contrat.
* Autre jurisprudence conséquente concernant la non-constructibilité d’un terrain vendu (Cour de cassation III, 21 mars 2024, n° 22-24.445).
L’inconstructibilité d’un terrain est considérée comme relevant de la garantie des vices cachés et non de la délivrance conforme.
L’erreur doit s’apprécier au jour de la vente.
L’évolution de la situation du bien postérieure à la vente ne peut par définition être considérée comme un vice caché.
Des vendeurs cèdent à une SCI une parcelle avec transfert d’un permis de construire d’un chalet.
L’acte prévoyait des travaux dont le délai d’exécution était expiré au jour de la vente.
Après le début des travaux, le Préfet demanda l’arrêt immédiat en raison du dépassement du délai accordé dans l’autorisation.
L’acquéreur a donc assigné devant le tribunal le vendeur en annulation de la vente pour erreur.
Dans un premier temps, la Cour d’appel de Chambery a rejeté cette demande en estimant que si l’autorisation était bien expirée au jour de la vente, l’acquéreur ne démontrait pas son impossibilité d’obtenir une nouvelle autorisation.
La Cour de cassation casse et annule l’arrêt en considérant :
« Après avoir retenu qu’il était déterminant pour l’acquéreur que la construction soit réalisable et que le projet de ce dernier rendait nécessaire le busage du ruisseau, dont les travaux étaient soumis à autorisation, et constaté, qu’au jour de la vente, ladite autorisation, qui n’était pas annexée à l’acte de vente, était expirée, la cour d’appel a violé (l’ancien article 1110 du Code civil). »
Pour la Cour de cassation, l’autorisation de travaux était expirée, de sorte que le bien devenait inconstructible et cette inconstructibilité était inconnue de l’acheteur puisque l’autorisation expirée n’était pas annexée à la vente.
* Enfin, bien que l’action en rescision pour lésion soit rare, la Cour de cassation a donné des indications quant au calcul des intérêts lorsque l’acheteur qui risque la lésion offre un supplément de prix qui, aux termes de l’article 1682 du Code civil, est majoré de l’intérêt du jour de la demande en rescision (Cour de cassation III, 1er février 2024, n° 22-11.297).
La Cour de cassation, au vu de l’article 1682 du Code civil, considère que si l’acquéreur préfère garder des choses en fournissant le supplément du juste prix, il doit l’intérêt de ce supplément du jour de la demande.
Reste à savoir ce que veut dire le jour de la demande.
Ce supplément doit être considéré comme une quotité de la valeur de la chose, il suit jusqu’à son évaluation définitive les variations de la valeur de cette chose.
Dès lors, il n’y a pas à majorer cette somme des intérêts aux taux légaux à compter de l’assignation, mais à distinguer les variations de la valeur de l’immeuble entre la date de la demande et la date du jugement.
Bien entendu, cela implique une variation de la valeur de l’immeuble à la hausse comme à la baisse entre les deux dates.
Béatrice Bénichou- Médina – Notaire – Office Notarial Europole Presqu’île
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