Dans cette affaire une ville a eu recours à un photographe pour réaliser un reportage relatif à la saison estivale et à son patrimoine.
Le reportage réalisé comportait 400 clichés de différents sites dont des plages ; le photographe avait adressé sa facture intégrant expressément la mention selon laquelle « Les photographies sont « libres de droits ».
Deux ans plus tard, alors qu’il n’était plus accrédité, le photographe a constaté que le site web de la mairie publiait de manière recadrée sans son autorisation et sans mentionner son nom l’une de ses photographies.
Le photographe a assigné la ville en contrefaçon de droits d’auteur et en paiement de dommages et intérêts pour une photographie de plage. Le requérant a été débouté en première instance.
Les photographies sont éligibles au titre du droit d’auteur comme le prévoit l’article L. 112-2 9° du Code de la propriété intellectuelle qui dispose que :
« sont considérées notamment comme des oeuvres de l’esprit au sens du présent code :
9° Les oeuvres photographiques et celles réalisées à l’aide de techniques analogues à la photographie« .
Pour être protégée au titre du droit d’auteur, une oeuvre doit être, non seulement matérialisée sur un support, mais surtout être caractérisée par l’empreinte de la personnalité de son auteur.
Cette preuve de l’originalité incombe au photographe. Le photographe bénéficie de droits patrimoniaux qui lui permettent de percevoir une rémunération pour l’exploitation de ses œuvres par des tiers ainsi que des droits moraux rattachés à la personne de l’auteur qui recouvre le droit de paternité et droit au respect de l’oeuvre.
La Cour dans son appréciation souveraine a considéré que différents éléments notamment « les couleurs brun-rougeâtres des voiles des Cornish se détachant sur le bleu de la mer » … « mais aussi par leur nombre et leur regroupement qui font s’interroger sur la raison de leur présence à cette heure de la journée et de leur manoeuvre à une distance assez proche de la plage » permettaient de retenir l’originalité de la photographie et par voie de conséquence son éligibilité à la protection du droit d’auteur.
Sur la demande indemnitaire, le photographe réclamait une somme de 3.000 euros au titre du droit patrimonial, cette demande n’a pas été accordée au motif qu’en insérant la mention « libre de droits » à son devis et dans la facture, le photographe a clairement renoncé à toute rémunération pour l’exploitation des clichés du reportage réalisé par ses soins.
La Cour a cependant reconnu une atteinte au droit moral en ce que sa photographie a été utilisée avec recadrage par la commune sur son site Internet et sans que son nom ait été reproduit sur ledit cliché, le recadrage ayant conduit à la suppression de la quasi-totalité de la plage.
La Cour a condamné la commune a payé au photographe une somme de 500 euros en tenant compte de l’usage numérique dudit cliché sur la page d’accueil du site Internet de la commune.
Cette décision doit conduire les photographes à encadrer l’exploitation de leurs créations par la rédaction d’un contrat de cession.
Cour d’appel de Rennes – 1ère Chambre 17 janvier 2023 / n° 20/05121
Nathalie Bastid – Avocate associée
Pour plus d’informations, vous pouvez la contacter bastidnathalie@gmail.com – 06.09.68.51.54
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