Le Tribunal Judiciaire d’Annecy, par ordonnance de référé du 7 septembre 2020, s’est prononcé sur les loyers commerciaux dus durant le confinement.
Bien évidemment, il ne s’agit que d’une décision de référé qui n’a pas l’autorité de la chose jugée émanant d’un Tribunal et non d’une Cour d’Appel.
Cependant, le principe est intéressant.
Dans la présente affaire une grande enseigne nationale refusait de payer le loyer commercial dû durant le confinement faisant valoir durant cette période le principe de la force majeure, l’exception d’inexécution et la suspension du bail.
De son côté, le bailleur rappelait que le gouvernement dans l’arsenal législatif prévu à cette occasion, la franchise de loyer n’était aucunement prévue.
Le Juge des référés a rappelé l’arrêté du 15 mars 2020 complétant celui du 14 mars 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, les commerces non essentiels n’ayant pu accueillir de public entre le 15 mars 2020 et le 11 mai 2020, date à partir de laquelle une réouverture au public a été autorisée sous conditions.
Unilatéralement, le bailleur qui est une grande enseigne nationale a indiqué qu’elle suspendait les loyers pendant la période de fermeture du magasin.
L’article 4 de l’ordonnance du 25 mars 2020 n°2020-306 a interdit l’exercice des voies d’exécution forcée et sanctions associées par le bailleur en vue du recouvrement des loyers commerciaux, ceci reste exigible.
Aucun texte n’a prévu la gratuité des loyers.
Par ailleurs, le Juge des référés est demeuré prudent en examinant les pièces produites aux débats par l’enseigne preneur en indiquant que ces pièces n’étaient pas de nature à démontrer que la fermeture du magasin leur empêchait d’exécuter son engagement, à savoir son obligation de payer, et ce d’autant que le Juge a relevé que ce locataire ne produisait aucun élément chiffré permettant d’établir la réalité ni l’ampleur de la perte financière évoquée et la difficulté à s’acquitter de ses obligations contractuelles.
Sur l’exception d’inexécution, le Juge des référés retient que la fermeture administrative imposée ne suffit pas à démontrer que le bailleur a méconnu son obligation de délivrance et de jouissance des lieux loués ni la gravité des conséquences de l’éventuel défaut d’exécution contractuelle en référence à l’absence d’éléments comptables produits.
En conséquence, le Juge des référés a rappelé que l’obligation de paiement du loyer ne se heurtait pas à une contestation sérieuse.
La société locataire a donc été condamnée au règlement des loyers.
Cependant, le Juge des référés a pris acte de l’absence d’opposition du bailleur sur l’octroi d’éventuels délais et a accordé un délai d’un an à la société locataire pour régler l’impayé né durant la période de confinement.
Cette décision de référé est importante.
Elle balaye les arguments de force majeure, d’exception d’inexécution ou d’obligation de délivrance comme n’étant pas des arguments pouvant démontrer une quelconque contestation sérieuse rendant le Juge des référés incompétent pour prononcer une condamnation à titre provisionnel.
Cependant, la lecture attentive de l’ordonnance laisse entrevoir quelques possibilités au locataire si celui-ci avait versé un certain nombre de pièces aux débats.
Notamment, si le locataire avait démontré avoir généré aucun chiffre d’affaires pendant la période de confinement, il n’est pas certain en l’état que le Juge des référés maintienne sa position.
La problématique reste donc intéressante et à suivre.
Jean-Luc Médina – Avocat associé
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