Pour protéger son activité, l’agent immobilier insère de manière quasi systématique dans le mandat une clause de droit de suite.
Cette clause prévoit que le mandant (vendeur) s’interdit de traiter directement ou indirectement avec un acquéreur qui a été renseigné sur le bien par l’agent immobilier.
Cette interdiction s’applique pendant le cours du mandat et pendant une certaine durée après la fin qui ne peut excéder deux années.
Cette clause a pour but de protéger l’agent immobilier contre d’éventuelles manœuvres pour éluder son droit à commission.
Très souvent, une clause pénale sanctionne les non-respects de cette clause.
Le mandataire a droit alors à une indemnité forfaitaire à titre de clause pénale d’un montant égal à celui de la rémunération TTC du mandataire telle que prévue au contrat, sachant que depuis la loi ALUR, ce montant de clause pénale est limité à celui de la commission prévue au contrat.
En général, l’agent fait signer un bon de visite aux éventuels acquéreurs lors de la visite d’un bien et adresse à son client mandant la liste des personnes qui a visité le bien afin d’empêcher ce mandant d’entrer directement en contact avec une personne qui a déjà visité le bien par l’intermédiaire de l’agent immobilier.
La jurisprudence est très sévère dans l’application des principes.
Ainsi, si un agent oublie de notifier la liste des personnes ayant visité les locaux, en général, il n’aura pas droit à indemnisation (Cour de Cassation, 1e Chambre Civile, 6 décembre 2017).
Egalement, lorsque le vendeur confie des mandats non-exclusifs à plusieurs agents immobiliers, seul celui par l’entremise duquel l’opération était définitivement conclue a droit aux honoraires, même si l’acquéreur a été précédemment présenté au vendeur par un autre agent immobilier (Cour de Cassation, 1e Chambre Civile, 15 janvier 2015).
Dans cette hypothèse, l’agent immobilier pourrait obtenir des dommages et intérêts s’il prouve la faute du vendeur qui l’aurait privé de la réalisation de la vente ou la collusion frauduleuse entre le vendeur et l’acquéreur.
Il n’y a en effet pas matière à reconnaître une quelconque faute
à négocier par l’intermédiaire d’un autre agent immobilier à
des conditions différentes notamment lorsque la seconde agence a
accepté de baisser sa commission (Cour de Cassation, 3ème
Chambre Civile,
16 octobre 2013).
Cependant, un arrêt récent de la Cour de Cassation du 23 janvier 2019 vient à nouveau remettre en question un certain nombre de principes en faveur de l’agent immobilier.
Dans cette espèce, un agent immobilier avait fait visiter un bien à un acheteur qui a remis une lettre d’intention d’achat pour un prix de 171 500 € hors commission, offre à laquelle il n’a pas donné suite.
Quelques semaines plus tard, les vendeurs ont signé avec ce même acheteur une promesse de vente pour un prix de 170 000 € par l’intermédiaire de l’office notarial.
La commission demandée par le notaire était à la charge de l’acquéreur et inférieure à celle de l’agent immobilier (6 450 €).
L’agent immobilier a demandé la mise en jeu de la clause pénale ce qui lui fut refusé par un arrêt de la Cour d’Appel d’Aix-en-Provence.
La Cour d’Appel d’Aix-en-Provence a constaté l’absence de manœuvres frauduleuses dans le but de faire échec au droit de l’agent immobilier.
La Cour de Cassation a cassé et annulé l’arrêt rendu par les Juges du fond.
La Cour d’Appel avait pourtant constaté que le mandat donné à l’agent immobilier stipulait l’interdiction pour les mandants, pendant sa durée, les 12 mois suivant sa résiliation, de traiter directement par l’intermédiaire d’un autre mandataire avec un acheteur présenté par l’agent immobilier et que la vente avec un acheteur présenté au vendeur par l’agent immobilier avait bien été conclue durant cette période.
Cette affaire est néanmoins spécifique puisque le mandat prévoyait une clause opposant l’interdiction pour les mandats pendant une certaine durée suivant la résiliation de traiter directement ou par l’intermédiaire d’un autre mandataire avec l’acheteur présenté par l’agent immobilier.
Ainsi, la Cour de Cassation n’a fait qu’appliquer le droit des contrats et a fait respecter les engagements pris par les vendeurs.
Le contrat faisant la loi des parties, il apparaît tout à fait normal que la Cour de Cassation ait exigé son application.
Béatrice Bénichou- Médina – Notaire – Office Notarial Europole Presqu’île
Pour plus d’informations, vous pouvez la contacter beatrice.benichou-medina@notaires.fr
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