Par un arrêt du 10 octobre 2018, n°16.24141, la Chambre commerciale de la Cour de cassation vient nous rappeler, dans un contexte particulier, sa jurisprudence désormais constante depuis 2012, relative aux conditions de fixation de la rémunération du dirigeant de société par assemblée générale.
Au cas d’espèce, le litige s’était noué dans le cadre d’un partenariat entre deux sociétés pour le développement d’un projet commun, au terme duquel une SAS avait été créée et l’associé fondateur de l’une d’entre elles nommé président de cette dernière pour une durée limitée.
Aux termes d’une assemblée générale, les associés de cette SAS avaient fixé à une certaine somme l’acompte mensuel de la rémunération du mandat de président de cette société.
À la suite de désaccords, le président de la SAS fut révoqué et il demanda en justice le complément de rémunération qu’il estimait lui être dû ; selon lui, le terme « acompte mensuel » permettait de supposer qu’une rémunération différente pouvait être définie par la suite, car la somme ainsi fixée n’était qu’un versement partiel à valoir sur la rémunération totale qui lui était effectivement due.
Si cette argumentation paraissait judicieuse et empreinte de bon sens, tout acompte versé supposant qu’un solde restât dû, la Cour de cassation ne la suivit néanmoins pas et rappelle qu’aucun engagement relatif à un complément de rémunération n’avait été souscrit au profit du Président de la SAS, qu’aucune décision n’avait été prise à ce sujet par les associés, et ce alors que ledit Président avait la possibilité de mettre à l’ordre du jour d’une assemblée générale la question du complément de sa rémunération ; qu’en cet état, ledit Président ne démontrait pas qu’il avait été privé de la rémunération revendiquée. Le dirigeant de la SAS devait donc se contenter du versement du seul acompte mensuel fixé par l’assemblée générale initiale sans pouvoir prétendre au versement d’un quelconque solde, car, en l’occurrence, non fixé par une assemblée générale postérieure.
Cette décision de justice peut paraître sévère mais elle rappelle le strict formalisme du droit des sociétés en matière de fixation de la rémunération du dirigeant de société : il est nécessaire qu’elle soit décidée par assemblée générale. Peu important les circonstances entourant l’exercice du mandat par le dirigeant.
En pratique il sera donc vivement conseillé à tout dirigeant de société :
1/ de faire décider par une assemblée générale dûment convoquée les modalités de fixation de sa rémunération ;
2/ d’apporter une attention soigneuse à la rédaction des termes de la délibération soumise au vote des associés ;
3/ de convoquer toute nouvelle assemblée générale afin de faire compléter ou préciser la décision antérieure afin d’éviter tout risque de contestation en cas de litige, comme ce fut le cas dans l’arrêt de la Cour de cassation susmentionné, ce d’autant plus si la somme en jeu est importante.
Thierry Lebrun – Avocat associé
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