(Cour de cassation, 3ème chambre civile, 15 juin 2023, n° 21-10.119)
Un bailleur a donné à bail commercial à une société locataire deux appartements situés dans une résidence de tourisme à GRENOBLE.
Le bailleur a assigné le locataire en paiement d’un arriéré locatif, indemnisation de ses préjudices, remboursement de frais d’huissier et justice et communication de documents comptables de la résidence.
La Cour d’appel de GRENOBLE, dans son arrêt du 5 novembre 2020, a condamné le locataire à payer au bailleur certaines sommes complémentaires au titre des loyers des 1er et 2ème trimestres 2020.
Or, le locataire a estimé que constituait un cas de force majeure susceptible de l’exonérer au moins temporairement du paiement des loyers, l’impossibilité pour une société de location touristique d’exercer son activité en raison des interdictions prononcées par les autorités publiques dans le cadre des mesures sanitaires prises pour la lutte contre la pandémie de Covid-19.
Le locataire a estimé qu’il ne pouvait régler les loyers durant la période de confinement, dès lors qu’il avait subi une perte totale de clientèle s’apparentant à la perte de la chose due.
La Cour d’appel de GRENOBLE a refusé de retenir l’existence d’un cas de force majeure lié à l’épidémie de Covid-19 et a simplement constaté que le locataire ne présentait pas de difficultés de trésorerie rendant impossible l’exécution de son obligation de payer les loyers.
Le locataire a reproché à la Cour d’appel de GRENOBLE de ne pas avoir recherché si pendant la période de confinement il n’a pas été mis dans l’impossibilité d’exercer la moindre activité.
Le locataire souhaitait voir reconnaître un cas de force majeure présentant un caractère imprévisible lors de la conclusion du contrat et irrésistible dans son exécution.
Dès lors que les textes résultant de la législation Covid-19 avaient interdit l’accueil du public dans les résidences de tourisme, le locataire souhaitait voir reconnaître la force majeure et, par voie de conséquence, l’exonération de paiement de tout loyer.
La Cour de cassation a rappelé qu’aux termes de l’article 1148 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016, il n’y a lieu à aucuns dommages et intérêts lorsque par suite d’une force majeure ou d’un cas fortuit, le débiteur a été empêché de donner ou de faire ce à quoi il était obligé, ou a fait ce qui lui était interdit.
La Cour de cassation a rappelé que le débiteur d’une obligation contractuelle de sommes d’argent inexécutée ne pouvait s’exonérer de son obligation en invoquant un cas de force majeure.
L’arrêt a été confirmé dans son principe de refus de la force majeure, mais par une substitution de motif.
La position de la Cour de cassation est classique.
La jurisprudence a toujours refusé de reconnaître la force majeure pour le débiteur d’une obligation de sommes d’argent.
Cette solution est issue d’un arrêt ancien du 16 septembre 2014 (n° 13-20.306).
Plusieurs décisions rendues pendant la crise sanitaire ont confirmé cette solution.
En matière d’obligation de paiement de sommes d’argent, il est impossible pour le débiteur défaillant d’invoquer la force majeure pour échapper à sa responsabilité.
Cette jurisprudence est donc approuvée et elle est dans la ligne des jurisprudences antérieures.
Jean-Luc Médina – Avocat associé
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