(Cour Cass., 3ème civ., 13 octobre 2021, n° 20-12.901)
L’arrêt commenté est intéressant, car il traite d’un problème très courant.
Des bailleurs ont accepté le renouvellement du bail commercial de leur locataire exploitant un commerce de restaurant-bar-brasserie moyennant la fixation d’un loyer déplafonné et ont assigné leur locataire en fixation du loyer du bail renouvelé en revendiquant une valeur locative en augmentation.
Les bailleurs faisaient état du bénéfice par la brasserie d’une terrasse agrandie sur le domaine public moyennant un faible montant de la redevance d’occupation en comparaison avec le chiffre d’affaires élevé généré et la meilleure visibilité donnée au bar-brasserie exploité dans les lieux.
La Cour d’appel de Besançon, dans son arrêt du 11 septembre 2019, a considéré que l’extension de la terrasse au cours du bail expiré, installée sur le domaine public et exploitée en vertu d’une autorisation administrative, ne pouvait être retenue comme une modification des caractéristiques des locaux loués, dès lors qu’elle ne faisait pas partie de ceux-ci.
Le raisonnement de la Cour d’appel est clair, les bailleurs ne sont pas à l’origine de cette extension, de sorte qu’ils ne peuvent profiter d’un déplafonnement du loyer à la valeur locative.
La Cour de cassation censure le raisonnement de la Cour d’appel.
La Cour de cassation considère que l’autorisation municipale accordée, en permettant d’étendre l’exploitation d’une terrasse sur le domaine public, contribue au développement de l’activité commerciale. Il appartenait donc à la Cour d’appel de rechercher si cette situation modifiait les facteurs locaux de commercialité et constituait par-là même un motif de déplafonnement.
La Cour de cassation demande implicitement à la Cour d’appel de ne pas rajouter aux textes, de ne pas vérifier si la terrasse entre dans le périmètre du bail, ni si ce bénéfice émane directement du bailleur.
Il suffit donc d’établir qu’un seul des critères de modification notable visés aux articles 1 à 4 de l’article L 145-33 du Code de commerce est démontré sans aucune autre condition.
En l’occurrence, il s’agit d’une modification des caractéristiques du local. Cette modification a été jugée par un expert notable. Elle suffit donc au déplafonnement.
Les locataires doivent donc se méfier des largesses accordées non pas par leur bailleur, mais par la puissance publique ou par une autorité municipale.
Elles peuvent avoir une incidence sur le loyer dont bénéficie le bailleur, alors que celui-ci est resté totalement passif.
Cette jurisprudence paraît conforme à la lettre du texte de l’article L 145-33 du Code de commerce.
Jean-Luc Médina – Avocat associé
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