(Cour de cassation, 9 mars 2022, n° 20-19.188)
La Cour de cassation a eu l’occasion de préciser récemment un point important dans l’évaluation de la valeur locative du bail commercial renouvelé.
Un bailleur a saisi le juge des loyers commerciaux en fixation du bail renouvelé à la date du 1er janvier 2012.
La Cour d’appel de Bordeaux, dans un arrêt du 18 décembre 2019, avait estimé que le local étant situé dans une galerie commerciale et que la création de galerie prévue postérieurement à la date du renouvellement du bail au 1er janvier 2012 pouvait être prise en compte dans la fixation du montant du loyer.
Bien que cette création de galerie fût postérieure à la date du renouvellement de bail, elle était déjà connue à cette date.
La Cour de cassation a cassé cet arrêt de la Cour d’appel de Bordeaux, considérant que la Cour d’appel avait violé les dispositions de l’article L 145-33 du Code de commerce.
Juridiquement, le loyer du bail renouvelé doit être fixé en tenant compte exclusivement des éléments existants à la date du renouvellement.
Cette décision est à approuver.
Le loyer doit être fixé à la date du renouvellement.
Seuls doivent être pris en compte les éléments de modification qui sont intervenus à la date du renouvellement.
Il ne faut surtout pas prendre en compte les projets connus et futurs, même si au jour du renouvellement, ces faits postérieurs peuvent avoir une influence sur l’attractivité du site et peut-être une incidence sur le loyer.
Mais la règle est clairement posée par la Cour de cassation : seuls les éléments de modification réalisés à la date du renouvellement peuvent être pris en compte.
Ce débat est fréquent en pratique.
En effet, les audiences qui désignent un expert judiciaire et les réunions d’expertise qui se déroulent dans un dossier en fixation de loyer à la valeur locative, interviennent souvent plusieurs mois après la date de renouvellement.
L’ensemble des parties est influencé par le devenir de la zone et vit au moment de l’expertise des changements majeurs qui sont intervenus postérieurement à la date du renouvellement et qui étaient connus avant.
Il est difficile de se projeter en arrière.
Parfois, les experts judiciaires se laissent piéger, mais il faut absolument rester sur une interprétation orthodoxe des textes.
Le fait qu’une grande enseigne soit annoncée dans un quartier, que les travaux aient déjà commencé et que la date d’ouverture soit connue, si cette date est postérieure à la date de renouvellement, l’impact de l’ouverture de cette grande enseigne ne doit pas entrer en considération dans la fixation de la valeur locative du bail.
Il s’agit d’une décision très sage de la Cour de cassation.
Le bailleur n’est pas totalement perdant dans l’affaire, puisqu’il attendra sans doute le prochain renouvellement pour faire valoir ces changements qui pourront constituer une modification notable des facteurs locaux de commercialité permettant un nouveau déplafonnement du loyer du bail.
Jean-Luc Médina – Avocat associé
Pour plus d’informations, vous pouvez le contacter jl.medina@cdmf-avocats.com – 04.76.48.89.89
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