La transformation des modes d’organisation du travail, amorcée depuis la crise sanitaire et accélérée par l’essor du télétravail et du travail hybride.
L’actualité jurisprudentielle récente en la matière, notamment un arrêt marquant rendu par la Cour de cassation au début de l’année, offre un nouvel éclairage sur les obligations des employeurs et les droits des salariés.
Les entreprises continuent de repenser leurs organisations pour intégrer durablement le travail hybride.
Si le télétravail s’est imposé comme une norme pendant la pandémie, les modèles hybrides combinent désormais présence sur site et périodes de travail à distance.
Cette évolution oblige les employeurs à revoir l’aménagement des postes, à mettre à jour leurs protocoles de sécurité et à adapter la gestion des risques psychosociaux.
Avec notamment des enjeux de sécurité et de bien-être et l’adaptation des outils et des processus.
Les récentes réformes insistent sur l’obligation pour l’employeur d’explorer toutes les possibilités de reclassement du salarié, notamment en cas d’inaptitude constatée, même partielle. La jurisprudence actuelle tend à renforcer cette obligation en précisant que le rejet du reclassement doit être établi de manière objective, sans se reposer uniquement sur des critères économiques ou organisationnels.
Un arrêt rendu en février 2025 a confirmé que la mise en œuvre d’un télétravail mal adapté, sans révision des conditions réelles d’exercice du travail, pouvait constituer une circonstance aggravante en cas de licenciement pour inaptitude. La Cour a estimé que l’employeur devait démontrer qu’un poste adapté avait été recherché et proposé de manière effective.
Cette orientation jurisprudentielle incite les entreprises à renforcer leurs dispositifs internes de prévention, à assurer un suivi régulier de l’adaptation des postes et à engager une véritable politique de formation sur les nouvelles pratiques de travail.
Dans l’une des décisions les plus commentées du début de l’année 2025, une entreprise a été sanctionnée pour licenciement abusif, suite à la constatation que le salarié concerné n’avait pas bénéficié d’un aménagement effectif de son poste de travail en télétravail. Le salarié avait signalé des troubles musculosquelettiques et une surcharge de travail alors que la mise en place de dispositifs adaptés était insuffisante.
L’arrêt présente plusieurs points de réflexion majeurs avec notamment une démonstration de l’obligation de sécurité, une exigence de reclassement effectif et une évaluation de la charge psychologique et physique.
Cette décision marque un tournant dans l’appréciation des conditions d’adaptation au travail hybride. Elle rappelle aux employeurs qu’ils ne peuvent plus se contenter d’initiatives ponctuelles ou d’outils numériques standards pour assurer la sécurité et le bien-être de leurs salariés. L’arrêt, en redéfinissant les contours du reclassement, renforce la protection des droits des travailleurs tout en posant un défi de taille pour les entreprises en termes d’organisation interne.
Au-delà du contentieux individuel, ces évolutions imposent aux partenaires sociaux de repenser les accords collectifs dans une logique d’adaptation constante. Les négociations doivent intégrer la dimension hybride du travail en proposant des mesures.
Les nouvelles exigences mettent en lumière le rôle crucial des managers qui, dans le contexte du travail hybride, se doivent d’assurer un suivi rapproché de leurs équipes. La formation des responsables hiérarchiques sur les problématiques liées au télétravail et à la prévention des risques devient ainsi un enjeu central pour une gestion éthique et légale des ressources humaines.
Face aux mutations rapides, nombreux sont les juristes qui évoquent la nécessité de codifier certaines évolutions jurisprudentielles.
Une telle codification pourrait contribuer à une meilleure sécurité juridique pour les employeurs et les salariés en définissant de manière claire les obligations en matière de travail hybride et de reclassement.
Romain Jay – Avocat associé
Pour plus d’informations, vous pouvez le contacter r.jay@cdmf-avocats.com – 04.76.48.89.89