(Cour d’appel de Bordeaux, 1ère ch. civile, arrêt du 29 octobre 2024)
Dans cette affaire, courant 2014, un ingénieur en recherche et développement et son frère, dessinateur projeteur en bâtiment, se sont rapprochés d’un agriculteur afin de développer un logiciel dit « cahier sanitaire » destiné au commerce de bétails. Deux ans plus tard, ce dernier a créé une société qui a poursuivi le projet avec un autre prestataire.
Les deux frères se prétendant auteurs dudit logiciel ont fait procéder à une saisie-contrefaçon au sein de la société de l’agriculteur pour exploitation du logiciel sans leur accord.
A défaut d’accord amiable, ils ont engagé une action en justice sur le fondement de la contrefaçon et de la concurrence déloyale et parasitaire.
Déboutés en première instance, la Cour d’appel de Bordeaux a jugé notamment sur la qualité d’oeuvre de l’esprit du logiciel que selon l’article L 112-2, les logiciels sont des oeuvres de l’esprit, y compris le matériel de conception préparatoire et de la même façon, l’interface peut également relever des droits d’auteur.
Elle a rappelé qu’une oeuvre, même inachevée, peut bénéficier de la protection au titre des droits d’auteur, comme un travail d’ébauche de logiciel suffisamment avancé pour constituer une étape fonctionnelle du travail dès lors que celui-ci est en soi empreint d’originalité qui suppose la preuve de l’effort de personnalisation.
Or en l’espèce, la Cour a jugé que l’originalité ne saurait résulter « de la seule reproduction de captures d’écran de feuilles Excel et d’ interfaces, et notamment de l’interface utilisateur avec le détail de son menu … ou de l’ouverture des différentes pages dont il est affirmé par MM. [M] l’originalité (choix des couleurs, de la police, agencement et forme des menus, organisation de l’interface) sans expliquer en quoi les choix opérés, qu’ils s’agisssent des fonctionnalités du menu latéral gauche ‘Mon cheptel’, ‘Ma pharmacie’, ‘Mes outils’, du choix des couleurs,’vert foncé, vert clair, noir, blanc’, de la présence d’une loupe permettant l’affichage de détails, d’une possibilité de retour en arrière, ou encore de sous fonctionnalités ‘Mes animaux’, ‘Mes lots’, ‘Mes sorties’ etc … ».
Les requérants ont été déboutés de leurs demandes au titre de la contrefaçon mais la Cour a reconnu l’existence d’une concurrence déloyale en retenant que « Les éléments ainsi saisis (captures d’écrans …) et les déclarations de M. [I] confirment qu’il a repris dans le cadre du travail spécifique confié à la société … en vue de la création d’une application pour téléphone mobile, le travail préparatoire du logiciel ‘cahier des charges’ émanant des consorts [M] et qui était leur propriété.
Il résulte encore d’éléments trouvés sur le site web de M. [I] (pcanwebdev …) que la présentation du cahier sanitaire est conforme au travail des frères [M].
La seule reprise pour son compte de ce travail constitue une faute de la part de M.[I] qui cause préjudice aux appelants ».
Nathalie Bastid – Avocate associée
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