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03
Mai

DESPECIALISATION PARTIELLE : LE BAILLEUR N’A PLUS A MOTIVER SON REFUS

L’article L.145-47 du Code de Commerce permet au locataire commercial de s’adjoindre à l’activité prévue au bail des activités connexes ou complémentaires.

Pour ce faire, il doit faire connaître son intention au propriétaire par acte extrajudiciaire (depuis la loi du 6 août 2015, cette formalité peut être exercée également par lettre recommandée avec demande d’avis de réception) en indiquant les activités dont l’exercice est envisagé.

Il s’agit selon le texte d’une mise en demeure au propriétaire de faire connaître dans un délai de deux mois, à peine de déchéance, une éventuelle contestation du caractère connexe ou complémentaire de ces activités.

En cas de contestation, le Tribunal de Grande Instance doit être saisi par la partie la plus diligente.

Ce Tribunal doit se prononcer aux termes de l’article L.145-47 en fonction « notamment » de l’évolution des usages commerciaux. Le caractère connexe ou complémentaire relève de l’appréciation souveraine des juges du fond.

La Cour de Cassation dans un arrêt en date du 9 février 2017 a examiné un arrêt de la Cour d’Appel de Grenoble en date du 5 novembre 2015 qui a statué lui-même sur renvoi après cassation.

La société MIDAS FRANCE, locataire s’était engagée à ne pas exercer l’activité de pneumatique en contrepartie de quoi le bailleur lui garantissait l’exclusivité et la
non-concurrence des activités de vente et pose de tous éléments concernant l’échappement et l’amortisseur.

Le 7 janvier 2004, la société MIDAS a signifié à son bailleur une demande d’extension d’activité pour la vente, la pose et la réparation pneumatique en se fondant sur
l’article L.145-47 du Code de Commerce.

Par lettre du 3 mars 2004, c’est-à-dire à l’intérieur du délai de deux mois, le bailleur a répondu par lettre simple en refusant purement et simplement cette déspécialisation, sans  y apporter toutefois aucune motivation particulière.

La Cour d’Appel avait estimé que la société MIDAS devait être déboutée de sa demande de déspécialisation partielle, comme de sa demande visant à voir juger que l’activité de pneumatique était connexe ou complémentaire avec celle autorisée par le bail.

Cependant, la société MIDAS s’était focalisée principalement sur un moyen visant à contester la validité de la réponse du bailleur intervenue par lettre simple le 3 mars 2004.

La société MIDAS a estimé qu’en ne motivant pas son refus et en ne le signifiant pas par acte extrajudiciaire, ce bailleur avait perdu le droit de s’opposer à la déspécialisation partielle.

La Cour de Cassation a estimé que le bailleur n’était pas tenu de motiver son refus de déspécialisation partielle ni de faire connaitre sa réponse sous une forme particulière.

La Cour de Cassation a considéré que le bailleur avait manifesté « de façon
non équivoque
 » son opposition à l’adjonction aux activités autorisées au bail.

Dès lors, selon la Cour d’Appel confirmée par la Cour de Cassation, le bailleur ne pouvait encore encourir la déchéance prévue à l’article L.145-47 du Code de Commerce.

Cette décision de la Cour de Cassation est conforme aux textes.

En effet, si le locataire doit faire connaître son intention au propriétaire par acte extrajudiciaire ou par lettre recommandée avec accusé de réception, son intention d’obtenir une déspécialisation partielle au propriétaire par acte extrajudiciaire ou par une lettre recommandée avec accusé de réception, rien n’oblige dans le texte le bailleur d’y répondre par les mêmes voies.

Une lettre simple suffit donc.

De même, le texte n’oblige pas le bailleur à motiver sa contestation. Pourtant  il a toujours été conseillé par les spécialistes de motiver en contestant le caractère connexe ou complémentaire

Seul le Tribunal de Grande Instance peut être saisi par la partie la plus diligente et se prononcer en fonction notamment de l’évolution des usages commerciaux.

Nous savions que la jurisprudence admettait la possibilité pour le bailleur de contester la déspécialisation judiciairement sans encourir la forclusion quand même sa contestation fut erronée. (Cass 3è civ 6 Mars 1973). La cour de cassation franchit ici encore logiquement un cap .

Ainsi, la position de la Cour d’Appel de Grenoble confirmée par la Cour de Cassation est conforme à l’orthodoxie du texte qui ne rajoute pas de formalités particulières à la charge du bailleur, formalités non prévues expressément au texte.

(Cour de Cassation, 9 février 2017, 3ème Chambre Civile, n°15-28759).

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