Aux termes de l’article 815-13 du Code civil, lorsqu’un indivisaire a amélioré à ses frais l’état d’un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon l’équité, eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l’aliénation.
Le texte ajoute qu’il doit être pareillement tenu des dépenses nécessaires faites par un indivisaire sur ses deniers personnels pour la conservation même sans amélioration.
Il est fréquent que des biens immobiliers soient acquis par des parties en indivision.
Il s’agit d’hypothèse de mariage en séparation de biens ou d’héritiers suite à une succession.
Si l’un des indivisaires améliore à ses frais un bien, ou s’il assume seul les frais nécessaires à la conservation du bien ou paie plus que sa part, il doit théoriquement bénéficier d’une créance à l’encontre des autres indivisaires, même si les dépenses engagées n’ont pas nécessairement procuré une plus-value au bien.
Dans un arrêt du 26 janvier 2022 (Cour cass. civile 1ère, 26 janvier 2022, n° 20-17.898), la Cour de cassation avait à se prononcer sur la nature juridique de règlement d’un prêt relais réglé par un seul des indivisaires.
Le prêt relais constitue habituellement une avance partielle consentie par un établissement de crédit permettant à un vendeur acquéreur d’acheter un nouveau bien immobilier sans pour autant disposer des fruits de la vente du logement qu’il occupe, tout en lui accordant le bénéfice d’un délai supplémentaire pour vendre ce dernier.
Il assure donc la transition entre 2 crédits immobiliers.
Les remboursements ne sont pas nécessairement affectés à l’achat du nouveau bien immobilier.
En l’espèce, un des indivisaires avait procédé au remboursement d’un prêt relais souscrit pour l’acquisition d’un bien indivis.
La Cour de cassation devait se prononcer sur cette créance.
S’agit-il d’une dépense de conservation du bien ou d’une dépense d’acquisition ?
Il faut savoir que si ce remboursement est assimilé à une dépense d’acquisition, elle ne constitue pas forcément une créance à l’encontre de l’indivision.
Un arrêt récent de la 1ère chambre civile du 26 mai 2021 l’a affirmé dans un attendu très général en indiquant que le texte de l’article 815-13 du Code civil ne s’appliquait pas aux dépenses d’acquisition.
Il s’agissait d’un cas d’espèce d’époux séparés de biens, dont l’un a financé par un apport de ses deniers personnels la part de son conjoint dans l’acquisition d’un bien indivis.
La Cour de cassation a considéré que l’époux qui avait financé le bien ne disposait que d’une créance évaluable selon les règles de l’article 1543 du Code civil qui renvoie aux articles 1469 et 1479 du Code civil sur les récompenses.
Mais dans son arrêt du 26 janvier 2022, la Cour de cassation est très claire : elle considère que le règlement d’échéances d’emprunt ayant permis l’acquisition d’un immeuble indivis, lorsqu’il est effectué par un indivisaire au moyen de ses deniers personnels au cours d’indivision, constitue une dépense nécessaire à la conservation de ce bien et donne lieu à une indemnité sur le fondement de l’article 815-13 du Code civil, peu important que le prêt soit un prêt amortissable ou un crédit relais.
Cet arrêt règle donc quelques incertitudes juridiques, mais ouvre d’autres contestations notamment sur le moment auquel le créancier peut espérer être dédommagé en attendant ou pas le partage judiciaire.
Béatrice Bénichou- Médina – Notaire – Office Notarial Europole Presqu’île
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