Dans cette affaire, la Cour de cassation nous sert depuis quelques années un pas de tango.
Les baux commerciaux comportent très fréquemment une clause d’indexation annuelle appelée « clause d’échelle mobile », qui généralement doit s’appliquer en cas de variation de l’indice à la hausse ou à la baisse.
Un certain nombre de professionnels ont cru devoir, dans les années 2010 (après une expérience douloureuse de baisse de la variation des indices notamment en 2008), rédiger des clauses d’indexation stipulant que l’indexation ne peut s’appliquer qu’en cas de variation de l’indice à la hausse et non à la baisse.
En l’espèce, un établissement bancaire locataire a assigné son bailleur aux fins de voir déclarer la clause d’indexation réputée non écrite et de le voir condamner à lui restituer une somme non négligeable de plus de 90 000 € sur le fondement de la répétition de l’indu, pour une période non prescrite de 5 ans.
Depuis la nouvelle rédaction de l’article L 145-15 du Code de commerce, les clauses contraires à l’ordre public sont réputées non écrites.
L’action tendant à voir réputée non écrite une clause du bail commercial n’est théoriquement pas quant à elle soumise à la prescription.
Une clause d’échelle mobile doit varier théoriquement à la hausse comme à la baisse.
Les dispositions du Code monétaire et financier sont d’ordre public.
Il s’agit de ne pas fausser le jeu normal de l’indexation.
Une clause qui ne varie qu’à la hausse n’est pas conforme aux dispositions de l’article L 112-1 du Code monétaire et financier car elle exclut toute réciprocité de la variation de l’indice.
Elle doit donc être réputée non écrite.
Mais doit-elle être réputée non écrite en son entier ou simplement en ce qu’elle prohibe la variation à la baisse ?
La Cour d’appel de Reims, dans son arrêt du 9 juillet 2019, avait considéré que la clause devait être réputée non écrite en son entier, car la clause d’indexation était indivisible.
La Cour de cassation a considéré que la Cour d’appel n’avait pas trouvé des motifs propres à caractériser l’indivisibilité de la clause d’indexation.
Seule la stipulation prohibée devait être réputée non écrite.
Il s’agit d’un revirement de jurisprudence inchangée d’avis depuis son arrêt du 14 janvier 2016 (Cass. civ. 3ème, n° 14-24.681).
Dans sa jurisprudence inaugurée à sa date, elle avait affirmé qu’une clause excluant la réciprocité de la variation et stipulant que le loyer ne pouvait être révisé qu’à la hausse devait être déclarée comme nulle.
La solution dégagée paraît logique et claire, même s’il subsiste encore une incertitude liée à un arrêt précédent en date du 10 septembre 2020.
Dans cet arrêt, la clause litigieuse avait été annulée en son entier, alors que le bail ne précisait pas que la clause était essentielle pour le bailleur.
En effet, on peut considérer que si la clause est essentielle, elle doit être annulée en totalité et si elle ne l’est pas, seule la partie posant difficulté doit être annulée.
Il n’est pas certain que l’arrêt du 30 juin 2021 règle définitivement cette question précise, mais en termes d’opportunité et d’équité et de bonne foi, la solution dégagée par l’arrêt du 30 juin 2021 paraît aller dans la bonne direction.
Jean-Luc Médina – Avocat associé
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