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Juin

Bail commercial : condition d’indemnisation des manquements contractuels du bailleur

Cour de Cassation 3è 20 Avril 2023 n° 21-24.848

L’entretien des parties communes d’un centre commercial à la charge du bailleur propriétaire de celui-ci est souvent source de conflits.

Cette situation entraîne parfois des préjudices pour le locataire mais le chemin pour obtenir son indemnisation définitive n’est pas facile.

La Cour de Cassation a affirmé que le bailleur d’un commerce situé dans un centre commercial dont il est propriétaire était tenu d’entretenir les parties communes de ce centre qui sont des accessoires nécessaires à l’usage du local loué. (Cour de Cassation 3ème 19 décembre 2012 n°11-23541).

Dans un arrêt plus récent (Cour de Cassation 3ème 15 décembre 2021 n°20-14.423) la Cour de Cassation a également affirmé qu’à défaut de stipulation particulière du bail, le bailleur d’un local situé dans un centre commercial dont il est propriétaire n’était pas tenu d’assurer la bonne commercialité du centre.

Il faut souligner toutefois que la commercialité est une option abstraite sans définition juridique.

En l’espèce, un locataire justifiait de difficultés économiques et d’une baisse de chiffre d’affaires (il a d’ailleurs été mis en liquidation judiciaire). Il se plaignait d’un certain nombre de manquements contractuels de son bailleur à savoir :

  • absence de commercialisation de la cellule d’entrée du centre commercial,
  • non-respect des horaires d’ouverture,
  • défaut d’éclairage et d’entretien du site.

La Cour d’appel d’Aix-en-Provence avait considéré que les manquements contractuels relevés par l’expert désigné devaient entrainer la condamnation du bailleur à payer au locataire des dommages et intérêts correspondant au préjudice subi.

Or, la Cour de Cassation a été amenée à casser cet arrêt en rappelant les fondamentaux du droit civil de la responsabilité.

La responsabilité civile exige pour être retenue la preuve d’une faute, d’un préjudice et d’un lien de causalité.

Si l’absence de commercialisation de la cellule d’entrée, le non-respect des horaires d’ouverture et le défaut d’éclairage du site est imputable au bailleur et qu’il s’agit bien de manquement contractuel, la Cour d’appel d’Aix-en-Provence ne démontrait pas le lien de causalité entre le manquement contractuel relevé par l’expert et le prétendu préjudice financier subi par le locataire.

La Cour d’appel d’Aix-en-Provence avait noté que l’absence de commercialisation de la cellule d’entrée n’entrainait pas en soit un préjudice, de même que le non-respect des horaires d’ouverture et que le défaut d’éclairage et d’entretien du site qui étaient bien des manquements contractuels ne pouvaient être correctement corrélés à une baisse de l’activité chiffrable pour le locataire.

Il n’y a donc pas de lien de causalité entre les manquements relevés par l’expert désigné et le préjudice invoqué par le locataire.

Or en matière de responsabilité civile professionnelle, les conditions de preuve, de préjudice et de lien de causalité sont cumulatives.

Cet arrêt est également intéressant sur un second sujet. Le centre commercial disposait d’un règlement intérieur permettant au bailleur de sanctionner le locataire en cas d’infraction aux règles de continuité annuelle d’ouverture, aux prescriptions concernant l’éclairage de la vitrine et des enseignes et aux règles concernant les soldes et promotions. Il s’agit d’un règlement intérieur prévoyant des pénalités versées au profit du bailleur.

Or, la Cour d’appel d’Aix-en-Provence a condamné le bailleur à verser des indemnités à son locataire sur la base de ce règlement intérieur et du montant de ces pénalités qui n’étaient prévues qu’au profit du bailleur pour des infractions commises par le locataire.

La Cour de Cassation a considéré que la Cour d’appel d’Aix-en-Provence avait modifié les droits et obligations du règlement intérieur et qu’il n’était pas possible de le dénaturer.

La décision a donc été cassée.

Le locataire s’est retrouvé après la décision de la Cour de Cassation sans indemnités. Mais cet arrêt pose la difficulté des conditions exigées pour voir reconnaitre la responsabilité en tout domaine. Si le préjudice est un concept qui parait évident ainsi que la faute, oublier de qualifier et de caractériser le lien de causalité peut au final s’avérer très préjudiciable au plaignant et empêcher toute indemnisation.

Jean-Luc Médina – Avocat associé

Pour plus d’informations, vous pouvez le contacter jl.medina@cdmf-avocats.com – 04.76.48.89.89

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