(Cour de cassation, 3ème chambre civile, 19 octobre 2022, n° 22-13.451)
Qui doit prendre en charge les travaux prescrits par l’autorité administrative ?
Cette question, qui concerne dans l’espèce traitée par la Cour de cassation un hôtel, est parfaitement valable pour toutes sortes de commerces.
En l’occurrence, un locataire exploitait commercialement un hôtel.
Après la visite des locaux (15 années après l’acquisition par le locataire du fonds de commerce), la commission de sécurité de la Ville a émis un avis défavorable à la poursuite de l’exploitation de l’établissement pour des raisons liées à la sécurité du public.
Le locataire avait souhaité obtenir le remboursement des loyers acquittés pour les trois derniers trimestres du bail.
Il estimait que sauf stipulation expresse contraire figurant dans le bail, les travaux prescrits par l’autorité administrative notamment en matière de sécurité devaient rester à la charge du bailleur.
La Cour d’appel de Bordeaux a rejeté la demande en remboursement des loyers acquittés.
La Cour d’appel s’est focalisée sur des problèmes de responsabilité ayant entraîné la fermeture administrative.
La Cour d’appel a estimé que l’examen des pièces produites n’était pas de nature à établir la responsabilité entière du bailleur dans la fermeture administrative de l’établissement.
La Cour de cassation a cassé l’arrêt de la Cour d’appel de B.
Elle a estimé qu’il n’était pas contesté que de très graves anomalies dans l’hôtel étaient de nature à mettre en danger la sécurité des personnes et que sauf stipulation expresse contraire, les travaux prescrits par l’autorité administrative étaient à la charge du bailleur.
Cette jurisprudence est déjà établie et conforme.
Déjà dans un arrêt du 29 juin 2022 de la 3ème chambre civile (n° 21-14.482), locataire et bailleur se disputaient la prise en charge de travaux d’isolation phonique, étant précisé que la destination du bail consistait en un « bar à ambiance musicale ».
Le bail prévoyait que le preneur devait se conformer rigoureusement aux prescriptions administratives et autres concernant l’exercice d’activité et veiller à ce que celle-ci n’apporte aucune nuisance de quelque sorte que ce soit aux autres occupants de l’immeuble ou du voisinage, de manière à ce que le bailleur ne puisse à l’avenir être inquiété ou recherché.
Dans cette affaire, la Cour d’appel de Riom avait donné raison au bailleur contre le locataire, celle-ci ayant estimé que le fait que le preneur doive se conformer rigoureusement aux prescriptions administratives n’entraînait pas stricto sensu la prise en charge des travaux de mise en conformité du local aux normes acoustiques, puisqu’aucune clause spécifique du bail ne visait précisément les normes acoustiques.
La Cour de cassation a approuvé la motivation de la Cour d’appel.
Elle a considéré que la Cour d’appel pouvait avoir une interprétation souveraine de la volonté des parties et que la clause litigieuse pouvait tout à fait, par dérogation aux obligations normalement mises à la charge du bailleur, transférer au preneur le coût des travaux notamment d’isolation phonique, bien que ce terme n’ait pas été mentionné précisément.
Cela veut dire en conclusion qu’il faut être absolument attentif à la rédaction des clauses du bail.
La loi Pinel et son lot de dispositions d’ordre public nous laissent parfois inattentifs sur un certain nombre de clauses qui méritent discussion entre les parties.
La clause de transfert de la charge des travaux prescrits par l’administration reste un sujet de discussion.
Cette charge peut être imputée au locataire si elle est suffisamment précise.
En tout état de cause, elle reste à l’appréciation souveraine des juges du fond.
Jean-Luc Médina – Avocat associé
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