le Tribunal de l’Union européenne a annulé le 14 juillet 2021 une décision rendue par la chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) refusant l’enregistrement d’une marque tridimensionnelle.

La société Guerlain avait demandé l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne tridimensionnelle à l’EUIPO pour des rouges à lèvres.

Il est rappellé que l’article 4 du Règlement du Conseil (UE) n°2015/2424 en date du 16 décembre 2015, autorise la protection de la forme ou du conditionnement des produits au même titre que d’autres signes composés d’éléments verbaux ou figuratifs « à condition que ces signes soient propres :
– à distinguer les produits ou les services d’une entreprise de ceux d’autres entreprises ;

– et à être représentés dans le registre des marques de l’Union européenne d’une manière qui permette aux autorités compétentes et au public de déterminer précisément et clairement l’objet bénéficiant de la protection conférée à leurs titulaires. 

Le Tribunal rappelle que l’appréciation du caractère distinctif ne se fonde pas sur l’originalité ou l’absence d’utilisation de la marque demandée dans le domaine dont relèvent les produits et les services concernés.

Une marque tridimensionnelle constituée par la forme du produit doit nécessairement diverger de manière significative de la norme ou des habitudes du secteur concerné. Dès lors, la seule nouveauté de ladite forme n’est pas suffisante pour conclure à l’existence d’un caractère distinctif.

Le fait que les produits ont un design de qualité n’implique pas nécessairement qu’une marque constituée de la forme tridimensionnelle de ces produits puisse distinguer lesdits produits de ceux d’autres entreprises.

Le Tribunal relève que la prise en compte de l’aspect esthétique du signe n’équivaut pas à une évaluation de la beauté du produit mais vise à vérifier si celui-ci est en mesure de générer un effet visuel objectif et inhabituel dans la perception du public pertinent.

Enfin, le Tribunal constate que la forme en cause est inhabituelle pour un rouge à lèvres et diffère de toute autre forme existant sur le marché notamment il observe qu’elle rappelle celle d’une coque de bateau ou d’un couffin, la présence d’une petite forme ovale en relief est insolite et contribue à l’apparence inhabituelle de la marque demandée et le fait que le rouge à lèvres ne puisse pas être positionné de manière verticale renforce l’aspect visuel inhabituel de sa forme.

Les consommateurs n’ayant pas pour reflexe d’identifier l’origine d’un produit par sa forme, le demandeur d’une marque tridimensionnelle devra démontrer que la forme ou le conditionnement du produit diverge de manière significative de la norme ou des habitudes du secteur. Le caractère distinctif sera donc difficile à prouver.

TUE 14 juillet 2021 T-488/20 Guerlain/EUIPO

Nathalie Bastid – Avocate associée

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